Loin d’être un espoir pour les malades, les xénogreffes et les animaux transgéniques sont un danger mal contrôlé pour l’espèce humaine. De plus, aux dires même des scientifiques concernés, ils soulèvent également un problème éthique relativement important…
Une obstination inefficace et dangereuse
Depuis les premières tentatives de xénogreffes dans les années 20 jusqu’à aujourd’hui AUCUNE greffe d’un organe animal sur un humain n’a réussi. Pourtant, certains scientifiques continuent à rêver de pouvoir utiliser les animaux comme une source inépuisable d’organes. En effet, à l’heure actuelle, les donneurs humains sont trop peu nombreux. Mais quand certains scientifiques ont fait évoluer leur pratique et cherchent désormais à produire des organes artificiels qui ne seraient pas rejetés, d’autres persévèrent dans cette voie improductive et dangereuse. L’évolution de la génétique aidant, ils tentent désormais de modifier profondément l’animal en agissant directement sur son patrimoine génétique, pour que ses organes soient tolérés par l’organisme humain. Le problème majeur posé par cette technique est qu’elle favorise le passage transpécifique des maladies…
Un point sur ce qui est fait aujourd’hui
A l’heure actuelle, on utilise surtout la peau et les os d’origine bovine ou porcine, pour des greffes en générales transitoires (en attendant une greffe définitive). Les valves de porc utilisées en chirurgie cardiaque sont en réalité traitées pour être totalement inertes (elles n’ont plus leurs caractéristiques biologiques) et ont une durée de vie d’environ 10 ans… On envisage également d’effectuer des greffes de tissus neuronaux pour traiter certaines maladies dégénératives telles que Parkinson, ou de cellules pancréatiques de porc pour traiter le diabète.
Le problème du rejet
Le problème majeur auquel sont confrontés les chercheurs est le rejet aigu des greffes. Dans le cas d’une allogreffe, le receveur subit un traitement immunosuppresseur (qui « endort » son système immunitaire) mais il ne suffit pas dans le cas des xénogreffes qui sont toujours rejetées. Pour certaines greffes cellulaires, des techniques d’encapsulation sont développées : les cellules greffées sont enfermées dans une capsule biocompatible, ce qui leur permet de se développer normalement. Mais pour pouvoir greffer des organes, certains chercheurs tentent d’humaniser les greffons animaux par manipulation génétique, de telle sorte que leur compatibilité avec le corps humain soit augmentée…
Des porcs manipulés…
Les scientifiques l’avouent, il serait plus simple de tenter des xénogreffes d’organes de primates, et en particulier de grands singes. Mais les risques épidémiologiques sont trop grands, les grands singes sont des espèces protégées, le public y serait certainement opposé pour des questions éthiques et, surtout ils se reproduisent trop lentement… Leur choix s’est donc arrêté sur le porc, dont la taille des organes est compatible avec celle de l’humain, dont la reproduction est rapide, et pour lequel la question éthique devrait être limitée, étant donné qu’il est déjà élevé pour sa viande… Il est vrai que la complexité des comportements sociaux et les capacités cognitives de l’espèce porcine sont en général ignorées du public, qui préfère sans doute ne pas s’émouvoir de son sort.
…mais toujours des porcs
Ainsi, pour minimiser les différences entre les patrimoines génétiques de nos deux espèces, les scientifiques doivent « produire » des porcs transgéniques, exprimant un ou plusieurs gènes humains, limitant ainsi les risques de rejet… Ils oublient au passage un problème pourtant important : la capacité physique des organes ! Car si leur taille est quasiment identique à celle de leur homologue humain, il en va autrement de certaines de leurs qualités physiologiques. Le poumon des porcs a, par exemple, une capacité de 2,4 l par minute, contre 5,25 l pour celui d’un homme au repos… Autre caractéristique physiologique : certaines cellules sanguines humaines sont plus grosses que celles de porc et sont donc susceptibles de bloquer les vaisseaux capillaires d’un organe porcin ! (Buy, 2005)
Des risques à grande échelle
Le problème majeur de ces manipulations – aux dires même des chercheurs ! – est le risque de franchissement de la barrière transpécifique par des virus porcins. 25 d’entre eux ont déjà été identifiés chez le porc, dont la plupart ne lui cause aucune maladie et est donc difficilement détectable. Une fois mis en contact étroit avec l’organisme humain, il est fort probable qu’ils s’y adapteront, sans garantie d’être également silencieux chez l’homme ! Dès lors, les receveurs de ces greffes seront des dangers potentiels pour leur propre famille, leur communauté, voire même pour l’humanité, en tant que foyer potentiel d’une pandémie…
La question éthique
Le cas des animaux transgéniques soulève plusieurs problèmes éthiques. Il y a évidemment la question cruciale de la manipulation du vivant : l’humain peut-il se servir des autres espèces comme source d’organes, peut-il les modifier suivant son bon vouloir ? D’autre part, dans le cas des xénogreffes, il n’est absolument pas certain qu’un malade accepte de recevoir ce type d’organe, comme l’a d’ailleurs montré une étude réalisée au Canada. En outre, on peut s’interroger sur le statut de ces animaux porteurs de gènes humains et de ces humains porteurs d’organes animaux. Qu’est-ce qui fait l’humain ? Si l’on parvient à produire des cochons ayant un rein, un foie, un cœur, un cerveau humain, on risque de parvenir un animal plus proche de l’humain que de son espèce d’origine ! Et comment un humain, porteur de plusieurs organes porcins vivra t’il sa propre hybridité ?
Des chimères ?
En décembre 2005, des chercheurs californiens ont introduit des cellules embryonnaires humaines dans le cerveau d’un fœtus de souris. Elles sont devenues fonctionnelles… Plus récemment, en février 2006, des chercheurs britanniques ont demandé une autorisation pour créer des embryons chimères humain/lapine (de l’ADN humain dans un ovule de lapine). Outre la nécessité d’un encadrement juridique strict, finalement, plutôt que la notion d’espèce, n’est-ce pas alors l’individu – en tant qu’être sensible – qu’il faudrait protéger ? Car que l’on soit humain, cochon ou hybride, la souffrance reste intolérable…
Souffrance
La production d’animaux transgéniques passe nécessairement par celle de nombreuses générations « ratées », non viables ou porteuses de tares souvent très douloureuses (Thompson, 1997). En outre, si les phases de recherches sont réalisées dans un contexte d’élevage classique, où les cochons peuvent dans une certaine mesure exprimer leurs comportements naturels, il en va autrement des phases d’essais cliniques ! Leur environnement doit être stérile, ils vivent donc sur une litière en caoutchouc, et sont nourris d’aliments stérilisés et abreuvés d’eau filtrée et traitée… (Buy, 2005)
Les alternatives
Références bibliographiques :
Buy, M. (2005) : Xénotransplantation et bien-être animal : quelles alternatives ?, Lex Electronica, 10(2)
Thompson, P. B. (1997) : Genetic modification of animals can also result in dysfunctions severe enough to constitute cruelty, in : Ethics and the Genetic Engineering of Food Animals, Journal of Agricultural and Environmental Ethics, 1997, 10, pp: i-23.
Les xénogreffes ne sont qu’une voie de recherche parmi d’autres. Du fait des problèmes éthiques et sanitaires qu’elles posent, de nombreux chercheurs ont préféré réorienter leurs recherches On considère généralement qu’il existe trois alternatives aux xénogreffes : la thérapie génique cellulaire, l’utilisation des cellules souches et l’implantation d’organes artificiels. De nouveaux protocoles très prometteurs sont explorés, faisant appel par exemple aux cellules souches embryonnaires ou aux autogreffes. On peut aussi signaler les céramiques en phosphate de calcium destinées à remplacer les greffes osseuses naturelles. Dès lors, on ne peut cautionner que certains se refusent à abandonner une méthodologie ayant prouvé son inefficacité, inacceptable du point de vue l’éthique la plus élémentaire, source de souffrances pour un grand nombre d’êtres vivants – receveur humain inclus – mais également dangereuse à l’échelle de l’humanité !