L’affaire du Mediator vient de le rappeler tristement : le modèle animal n’est pas fiable pour tester l’innocuité des médicaments, pire il est dangereux. Cette affaire est ainsi l’éloquente et terrible illustration des failles d’un système. Faudra-t-il d’autres accidents pour que la réglementation abolisse les tests sur animaux dont les résultats hasardeux viennent d’être une nouvelle fois démontrés ? One Voice se bat pour cette abolition.
Le système de contrôle des médicaments est dans la ligne de mire depuis novembre 2010 avec les révélations faites sur le Mediator, médicament prescrit aux diabétiques et aux personnes en surcharge pondérale. Suspecté de causer des effets secondaires graves, il a été supprimé du marché en 2009, après plusieurs années de doutes. Un temps de réaction qui laisse songeur. Depuis, une liste de 59 médicaments suspects a été publiée par l’Afssaps, laquelle devrait être étendue à 76. Parmi les médicaments placés sous haute surveillance – certains étant en passe d’être retirés du marché -, on retrouve trois médicaments utilisés dans le traitement du diabète type 2, Byetta, Galvus et Januvia ; la Thalidomide, toujours prescrite pour soigner certains cancers bien qu’ayant provoqué des malformations sur des nouveau-nés alors qu’elle était donnée à la femme enceinte ayant des nausées ; Le Nexen, un anti-inflammatoire prescrit notamment pour soigner l’arthrose et suspecté d’être à l’origine d’hépatites graves… Des médicaments qui tous ont été expérimentés sur des animaux, qui tous ont passé le barrage des tests…
MODÈLE ANIMAL : UN MODÈLE TROMPEUR
Les laboratoires cherchent à nous rassurer en mettant en balance la vie humaine et celle des animaux. Sans aborder le domaine éthique, on constate pourtant que du sacrifice de l’animal, l’homme ne tire aucun secours, pire il est trompé par cette procédure présentée comme sûre alors qu’elle est erronée et peut lui être fatale. One Voice rappelle que l’affaire du Mediator n’est pas une première, il y a eu de terribles précédents, notamment avec le Vioxx, un anti-inflammatoire non stéroïdien, retiré du marché en 2004, qui semblait sûr et même bénéfique pour le cœur des souris, mais qui a provoqué plus de 100 000 crises cardiaques et accidents vasculaires cérébraux rien qu’aux Etats-Unis.
En France, les effets secondaires des médicaments représentent la 4e cause de mortalité et la 6e cause d’hospitalisation. Tous ces médicaments, faut-il le rappeler, ont été testés sur des animaux. Une situation dont l’absurdité fait frémir et contre laquelle One Voice et d’autres associations comme Antidote Europe, se battent sans relâche. Une situation qui coûte aussi des millions d’euros.
Le ministre du Travail et de la Santé, Xavier Bertrand, s’est engagé à bâtir un nouveau système de contrôle des médicaments. Bernard Debré, urologue et professeur des Universités, et Philippe Even, président de l’institut Necker, ont notamment été sollicités pour réfléchir aux solutions qui permettront d’« assainir la filière du médicament ». Leur rapport devrait être remis au ministre à la mi-mars 2011. One Voice prend acte de la volonté des pouvoirs publics d’améliorer un système inadapté et dangereux, mais pour l’association rien ne peut changer en profondeur sans l’abolition de l’expérimentation des médicaments sur les animaux. Et cela passe par le changement des règles…
UNE PROCÉDURE DU PASSÉ
Vingt mille personnes meurent chaque année en France suites aux effets indésirables de médicaments. La preuve douloureuse de la faillibilité du modèle animal. La procédure en vigueur oblige pourtant, avant que soient effectués les test « précliniques » sur l’homme, à tester les médicaments in vitro puis in vivo sur des animaux.
A ce stade expérimental, 90 % des substances testées sur les animaux avec des effets prometteurs vont cependant se révéler inefficaces, ou pire, toxiques pour les premiers « cobayes humains ». Faut-il s’en étonner ? L’homme est un animal, c’est une lapalissade, mais chaque espèce a sa propre biologie. La nature nous donne maints exemples de la différence de réponse des organismes à telle ou telle substance. L’amanite phalloïde, par exemple, nous tue, mais ce champignon ne fait aucun mal aux écureuils…
Des études sur des médicaments supprimés du marché ont montré que les effets secondaires à l’origine du retrait n’avaient été décelés chez l’animal que dans 5 % des cas. Au regard de la capacité prédictive des tests sur animaux, les plus ironiques avancent que cela revient à jouer le résultat aux dés. Mais il n’y a pas là place pour l’ironie. Le caractère aléatoire de l’expérimentation animale est irrecevable pour une vision scientifique du IIIe millénaire.
Si bien des médicaments, pour ne citer que l’ingrédient actif de l’aspirine, ont été mis au point sans avoir recours à l’expérimentation animale, il existe aujourd’hui des méthodes alternatives à celle-ci, des méthodes offrant, elles, un degré de fiabilité élevé. Elles supposent notamment d’intégrer les pratiques nouvelles issues de la recherche et doivent être validées par les autorités sanitaires. Encore une fois, sans aborder la question morale, le modèle animal est dangereux, relevant d’un temps où les connaissances n’étaient pas celles d’aujourd’hui. Il peut être aussi un frein aux découvertes. La revue anglaise The Ecologist de mars 2009 dans son article « Animal testing : science or fiction ? » citait le docteur Albert Sabin, inventeur du vaccin contre la polio (1953), qui en 1984 déclarait que « le vaccin a longtemps été retardé par la conception erronée de la nature de la maladie humaine basée sur des modèles expérimentaux inexacts observés chez les singes »…
Pour l’homme, pour l’animal, l’expérimentation animale doit être abolie.